Bon, j'ai fait mon rageux. En tant que (ancien) prof d'histoire, je me suis déjà étonné de voir à quel point le programme me renvoyait au mandat Giscard d'Estaing. Sans aucune volonté politique de la part de ceux qui ont rédigé ces manuels, souvent sans citer Giscard d'ailleurs, c'est juste que si vous étudiez les changements sociaux en France, quel que soit l'angle abordé, vous allez tomber sur une date-pivot quelque part dans le mandat de Valéry Giscard d'Estaing.
Voici un petit bilan rapide des réformes de VGE qui restent... qu'on le veuille ou non.
1974: Droit de vote à 18 ans. L'assemblée nationale est allée plus loin que Giscard, qui voulait simplement mettre certains droits à 18 ans et garder la majorité à 21.
1974 (confirmé en 1975): Droit à l'avortement (merci Simone). Une loi passée grâce à l'opposition, on ne peut pas mettre tout le mérite sur VGE... D'ailleurs, personne ne le fait: tout le monde attribue cette réforme à Simone Veil et non au président d'alors.
1974: "Réforme Haby" sur le collège unique mixte. L'éducation était déjà mixte dans les textes, elle l'est devenue dans la réalité et de façon durable avec cette réforme, qui signe la fin des collèges pour filles. Maintenant, elles devront aller dans les mêmes cours que les garçons. Depuis, le niveau des filles est généralement supérieur à celui des garçons dans les classes mixtes, une réalité que n'avalent pas certains machistes.
1974: Réforme du Conseil constitutionnel. Avant Giscard, le "Conseil des sages" ne pouvait être saisi que par le Président, le Premier Ministre ou les présidents de l'Assemblée ou du Sénat. Depuis 1974, 60 parlementaires suffisent à saisir le Conseil, qui n'est plus constitué que d'emplois fictifs, puisqu'ils commencent à bosser à temps plein.
1975: Loi sur le divorce à l'amiable. Cela paraît dingue aujourd'hui, mais avant 1975 le divorce ne pouvait être prononcé qu'en cas de faute d'un conjoint. Les couples qui voulaient tout simplement se séparer devaient s'envoyer des lettres d'insulte et les montrer aux avocats pour faire croire qu'ils se haïssaient... Une combine judiciaire qui prend fin avec le divorce à l'amiable, moins coûteux pour les époux.
1975: Réforme de l'audiovisuel, c'est la fin du média unique gaulliste, Giscard éclate l'ORTF en plusieurs sociétés, dont Antenne 2 et l'INA par exemple. Un début de pluralisme médiatique pour refléter le pluralisme politique.
1976: Plan Messmer sur le nucléaire, la France entamme la construction de 13 centrales et entre dans l'ère atomique. Aujourd'hui encore, la France est un des exemples de pays industrialisés qui a le nucléaire comme n°1 dans son mix énergétique. Comme disait le slogan de l'époque: "En France, on n'a pas de pétrole, mais on a des idées". Et pour gérer les déchets nucléaires, on a surtout des idées...
Bilan économique: c'est la fin des 30 glorieuses et Giscard est le dernier président à avoir signé des budgets équilibrés. Après lui, c'est le début du déficit qui se creuse encore aujourd'hui. Mais c'est un phénomène macro-économique qu'on ne peut pas attribuer à la fin de sa présidence. On peut seulement commenter sa gestion de l'entrée dans la crise.
Pour comparaison, voici un rappel des transformations sociales sous un autre président à mandat unique... Au hasard, disons Sarkozy:
2007: Bouclier fiscal pour protéger les plus hauts revenus.
2010: Fin de la retraite à 60 ans. L'âge légal passe à 62 ans.
2011: Le bouclier fiscal est finalement annulé pendant la campagne électorale.
2011-2012: Guerre en Syrie.
Bilan économique: augmentation exceptionnelle de la dette publique, de presque 50% entre 2007 et 2010, et augmentation considérable du chômage, tout en réduisant l'argent dépensé pour les retraites ou l'assurance maladie. Là encore, il y a un phénomène macro-économique en jeu: la crise des subprimes de 2007-2008, qu'on ne peut pas attribuer à Sarko. Mais on peut commenter sa gestion, et les économistes le font mieux que moi.