#116
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par P.A. » 11 mars 2010, 22:05
Vendredi soir
Jarrel, alias l’agent spécial Gallows, revenait de courir. Il avait eu besoin de sortir s’aérer, respirer un bon coup, et oublier un peu les récents événements. Il faisait ce petit manège de plus en plus souvent. Il posa ses écouteurs hurlants sur la table.
Il se lava rapidement, téléphona à sa mère (« oui, maman, tout va bien, mais oui je fais attention à moi »). Il se força à manger un bout, car il a une fâcheuse tendance à vomir tout ce qu'il essayait d'avaler. Voyant qu'il n'arrivait à presque rien ingurgiter, il se fit plutôt une verseuse de café, la seule chose qu'il tolérait encore. Il relut les lettres de Lindon, qu’il avait reçu il y a plusieurs mois. Il essaya de voir si il n’y avait pas de sous entendu, de messages supplémentaires. Ce ton bienveillant de Lindon … ses conseils … ses encouragements … ses difficultés ... Jarrel passa tout au crible pour voir si il n'avait pas laissé passer quelque chose, un doute, quelque chose qui trahirai qui il est aujourd'hui.
Il ressortit ensuite ses vieilles archives qu’il avait gardé de Louisville, dans le Kentucky. Régulièrement il regardait de nouveau son enquête sur Lindon-le-mentor et sa mort supposée il y a de ça 5 ans. Il cherchait cette fois-ci un détail qu’il aurait pu omettre, quelque chose qu’il pourrait découvrir avec le nouvel éclairage qu’il avait à présent. Un truc louche, encore plus que ce qui avait pu lui arrivé … Il en avait tellement appris depuis qu'il pensait forcément que la solution surgirait du papier lui, comme un petit bonhomme qui s'imposerait et qui dirait « tu m'as enfin trouvé après toutes ces années, t'en as mis du temps ». Mais rien.
*Il faut que tu oublies et que tu gardes la tête froide, Jarrel ! Réfléchis bon sang, tu as fait toutes ces études pour comprendre les gens, met toi à la place de Lindon ! Ou irais-tu si tu étais lui ?*
Lindon qui l'avait libéré et condamné à la fois. L'agent spécial Potence sait bien que sa durée de vie avait été artificiellement rallongée, et qu'il suffit que quelqu'un donne un coup de pied sous le seau qui le retient pour qu'il en soit fini de lui. Tout ce qui lui était arrivé, c'était du bonus, en quelque sorte.
Il pleura d'énervement. Ses jambes voulaient continuer à marcher pour essayer de faire venir les idées.
Il s’arrêta vers 3h du matin quand la verseuse de café lui conseilla d'arrêter … Il se posa sur son lit et réfléchit, pendant quelques minutes… Il pensait à tout et à rien, rien ne voulait se fixer dans son cerveau abimé. Il prit à nouveau le téléphone, machinalement, mais le garda en l’air, ne sachant plus qui il voulait appeler. C’est vrai ça, qui allait lui répondre à cette heure là ?
Il était parti pour refaire du café, quand il jeta un coup d’œil sur le double de la lettre qu’il avait rédigé à Gump et Grangarçon sur la table de la cuisine. Il manquait une date et une signature. Jarrel se caressa la cicatrice dans son cou, souffla, puis se leva d’un coup.
Il allait partir au moins pour ce soir, et effacer deux trois choses qui l'embêtaient. Il se rasa la tête, cela l'embêtait. Il prit une affiche où on pouvait lire « FUGAZI en concert ». C'était dans l'Etat voisin, le lendemain. Sur la côte. Il prit ses clefs de voiture. Il descendit à toute allure les escaliers de son immeuble, se mit dans sa voiture.
Il sourit quand ses mains tapotèrent le volant. Il savait où aller pour cette nuit. Il mit sa cassette de Minor Threat, où Ian McKaye beuglait comme un fou « j’ai l’avantage total sur vous ! », et démarra. Il allait profiter du début du soleil et ne rien faire d'autre. Le Delta Green pouvait aller se faire foutre au moins pour le week end.
Big Bang Boogie